Implacable édito du Times: "Malgré les politiques, les subventions et 29 Conférences des Parties (COP), le réchauffement climatique s’aggrave, et nous brûlons toujours plus d’énergies fossiles.
Le pétrole, le gaz et le charbon fournissent 86 % de l’énergie mondiale. Ces trois sources continuent de croître en volume absolu, tandis que la demande d’énergie explose. Du côté des absorptions, c’est pire encore : les écosystèmes clés sont détruits. Des pans entiers de l’Amazonie, brûlés ou déforestés, émettent désormais plus de carbone qu’ils n’en absorbent (...)
🇧🇷 Le Brésil, symbole d’un double discours
Tout cela se voit à l’approche de la COP30 au Brésil.
Le président Lula s’y présentera en protecteur de la forêt — tout en visant à faire de son pays l’un des quatre premiers producteurs mondiaux de pétrole.
Exploration offshore, forages en Amazonie, exploitation de la « marge équatoriale » : le Brésil passe du rôle de sentinelle climatique à celui de puissance pétrolière.
Pendant ce temps, la déforestation continue. Ironie suprême : une nouvelle route a été percée à travers la forêt pour permettre aux délégués de la COP d’y accéder. Difficile de faire plus symbolique.
Mais nul doute que les dirigeants réunis à Belém trouveront encore le moyen de proclamer qu’ils « sauvent la planète ».
🇬🇧 Le Royaume-Uni, champion de la vertu désindustrialisée
Londres adore se présenter en « leader mondial » de la transition, en vantant la baisse de ses émissions territoriales.
Mais qui, à Pékin, Moscou ou Washington, croit sérieusement que la voie britannique est un modèle ?
La Chine ne ferme pas ses mines de charbon.
La Russie n’interdit pas les licences pétrolières.
Les États-Unis forent plus que jamais.
Le Royaume-Uni, lui, importe tout.
La baisse apparente de ses émissions est avant tout le produit de la désindustrialisation : moins d’usines, moins d’émissions — mais plus d’importations.
Le pays affiche aujourd’hui les prix d’électricité industrielle les plus élevés du monde développé et attire peu d’investissements énergivores.
Si l’on mesure la réalité par la consommation carbone totale (c’est-à-dire les émissions importées), le tableau est tout autre : la fermeture des aciéries du nord de l’Angleterre n’a pas fait baisser l’empreinte carbone britannique, elle l’a simplement délocalisée en Chine.
🔥 La grande illusion des énergies bon marché
Le ministre de l’Énergie Ed Miliband aime répéter que l’éolien et le solaire sont “neuf fois moins chers que le gaz”. Mais si c’était vrai, pourquoi le Royaume-Uni aurait-il l’électricité la plus chère d’Europe ?
Pourquoi ses industries lourdes ferment-elles les unes après les autres ?
Acier, engrais, biocarburants, automobile, ciment : tout décline.Les investisseurs internationaux ne se ruent pas sur le “cheap green power” britannique. Ils vont là où l’énergie est réellement bon marché — aux États-Unis (grâce au gaz de schiste) ou en Asie (grâce au charbon).
🔱Les renouvelables ne sont bon marché qu’en apparence.
Leur coût marginal est faible, mais leurs coûts systémiques sont gigantesques : intermittence, stockage, renforcement du réseau, centrales de secours…
Résultat : il faut 120 GW de capacité installée pour produire ce que 60 GW suffisaient à générer avant la transition. Et ce sont ces coûts invisibles — transport, stockage, subventions, contraintes réseau — que les ménages et les entreprises paient.
Pire : plus on ajoute de renouvelables, plus ces coûts augmentent. Et pendant ce temps, le prix réel du gaz baisse. L’Europe paie désormais son gaz moins cher qu’avant 2014 (corrigé de l’inflation). (...)
💣 Mieux vaut arrêter de creuser
Le Royaume-Uni ne sauvera pas le climat en interdisant quelques forages de la mer du Nord, tout en importants des hydrocarbures plus sales. Il ne sauvera pas non plus son industrie en multipliant les contrats d’éolien offshore à prix garanti pendant 20 ans.
Miliband devrait admettre que le gaz n’est ni cher ni volatil, que les coûts systémiques des renouvelables explosent, et que le R.U. n’est pas une “superpuissance verte”, mais un archipel d’illusions coûteuses.
Le réchauffement planétaire ne ralentit pas, les ppm grimpent, les COP se succèdent et les bilans empirent.
Ce n’est plus le moment des slogans, mais de l’honnêteté :
- sur les coûts,
- sur notre empreinte réelle,
- et sur le fait que nous vivons très au-dessus de nos moyens écologiques.
À défaut, la prochaine génération n’héritera pas d’une planète sauvée, mais d’un climat irréversiblement abîmé — et d’une dette, verte, mais colossale."
Extraits de l'article de Sir Dieter Helm, professor of economic policy at the University of Oxford
thetimes.com/comment/columni…