Avec 2,4 milliards de chrétiens, il y a plus de persécutions en chiffres bruts que contre les Roms ou Yézidis.
En proportion, c’est l’inverse : 15 % des chrétiens sont concernés, un taux similaire aux musulmans, aux juifs, bien moindre que les 80–100 % des Rohingyas ou Ouïghours
Un rapport confirme ce que l’on sait tous, mais dont on parle peu: les chrétiens sont de loin la minorité la plus persécutée au monde, et c’est en terre d’islam qu’ils sont persécutés.
De l’Iran à l’Afghanistan, du Yémen à la Somalie, ils vivent dans la peur. Chaque jour au Nigéria, des chrétiens sont tués et leurs villages incendiés. Au Pakistan, des femmes et des fillettes chrétiennes sont régulièrement enlevées, converties et mariées de force. Le rapport évoque d’ailleurs le témoignage de Miriam, une jeune pakistanaise chrétienne qui raconte s’être cachée pendant des heures pendant qu’une foule assassinait sauvagement son grand-père, accusé de blasphème. Quand Miriam est sortie de sa cachette, elle n’a pas reconnu la dépouille de son grand-pere tellement il avait été supplicié.
Rien que cet été, des attentats dans des églises ont fait 40 morts au Congo et 25 en Syrie. Pour ces victimes, il n'y a pas eu de manifestation place de la République, pas de mouvement de solidarité sur Instagram, pas de gros titres dans la presse de gauche. Les chrétiens meurent dans l’indifférence de l’intelligentsia occidentale.
Les sociologues de gauche nous disent pourtant qu’un évènement n’est digne d’attention que s’il est révélateur d’un rapport de domination plus large. Or ces persécutions s’inscrivent bien dans le contexte d’un rapport de domination à sens unique, et même d’un nettoyage ethnique. Depuis 20 ans, 80% des chrétiens ont fui l’Irak. En Syrie, leur nombre a été divisé par trois depuis 2011. Dans les territoires palestiniens, les chrétiens ne représentent plus que 1% de la population, contre 15% il y a 50 ans. En Turquie, ils étaient 20% de la population au début du 20èmesiècle, ils sont 0,2% aujourd’hui.
Si le calvaire des chrétiens n’indigne pas beaucoup, c’est parce que certains autoproclamés progressistes s’intéressent uniquement à ce qui leur permet d’accabler l’Occident. Il y a 40 ans, Jean-François Revel constatait que les intellectuels qui condamnaient sans cesse l’apartheid sud-africain n’avaient pas un mot pour les nombreux massacres perpétrées simultanément sur le continent Africain par Amine Dada, Sékou Touré ou Robert Mugabe. « Non seulement, écrivait Revel, nous ramenons toutes les violations des droits de l’homme au racisme, mais nous ramenons tout le racisme à celui des Blancs. »
Aujourd’hui, rien n’a changé, en témoigne l’indifférence de nos élites non seulement au sort tragique des chrétiens, mais aussi à celui des Ouighours en Chine, des nigérians massacrés par Boko Haram, ou des victimes des guerres civiles sanglantes au Yémen, en Éthiopie ou au Soudan.
L’Occident, avec les Grecs puis avec les Lumières, a inventé l’autocritique civilisationnelle et l’examen de conscience. Mais certains ont retenu la leçon de travers. Au lieu de comprendre que chacun devait savoir jeter un regard critique sur toutes les civilisations, y compris la sienne, ils ont retenu qu’il fallait juger uniquement sa propre civilisation. À force, notre civilisation est devenue incapable de de voir qu’elle subit les assauts de ceux qui souhaitent la voir disparaître, et que le sort des Chrétiens d’Orient préfigure peut-être son avenir à elle.